Dans les coulisses de 'Y' : The Yokel réinvente la folk indé made in Grand Est

8 juin 2025

The Yokel, c’est une histoire d’amitiés, de voyages et de « do it yourself ». Né à Strasbourg en 2013, ce sextet amoureux de la scène s’est rapidement fait un nom bien au-delà du Grand Est, grâce à une identité musicale singulière, oscillant entre folk, bluegrass et pop moderne. Armés d’instruments atypiques (banjo, cuivres, contrebasse), de refrains à reprendre en chœur et d’un esprit frondeur, ils incarnent la vitalité de l’indé régionale, sur disque comme sur scène.

Après « Here Comes The Sun, Burning Down » (2017), puis l’acclamé « Yol ! » (2020), qui a séduit la critique régionale (polyvocalité, richesse des arrangements, spontanéité), The Yokel s’est imposé comme une référence à part entière, cumulant près d’un demi-million d’écoutes sur Spotify et remplissant les salles partout en France. Leur passage remarqué aux Eurockéennes de Belfort 2022 et leur présence sur des scènes majeures (La Laiterie à Strasbourg, Le Noumatrouff à Mulhouse) témoignent du chemin parcouru (Strasbourg Evènement).

L’annonce d’un troisième album, simplement intitulé « Y », attisait la curiosité. Que pouvaient bien concocter ces agitateurs qui, jusqu’ici, n’avaient pas peur de bousculer les codes de la folk traditionnelle ? Si les racines demeurent solides, 'Y' affiche dès les premiers extraits une volonté de renouvellement, voire de prise de risque artistique, sans renier la chaleur ni le côté chorale qui caractérisent The Yokel.

  • Un premier single « Highway Song », sorti en novembre 2023, pose les bases : une production plus affirmée, des nappes électroniques subtiles, et une énergie live qui rappelle l’ADN du groupe.
  • Des thèmes contemporains : sur ce nouveau disque, The Yokel traite sans détour de l’identité, de l’urgence écologique, de la quête de sens dans une époque saturée d’informations. Un reflet des questionnements d’une génération qui refuse la résignation.
  • Une écriture affinée : la langue anglaise, toujours majoritaire, se veut plus personnelle, parfois introspective, brisant la frontière entre chronique sociale et diary musical.

La parution de « Y » marque une nouvelle étape pour The Yokel, qui assume pleinement ses attaches locales. Ce nouvel album sort sous la bannière de 14 Records, label strasbourgeois fondé en 2015 et devenu un repère pour la scène indépendante du Grand Est (Flora, Electric Vocuhila, Camicela, etc.).

  • Co-production 100% locale : l’enregistrement a eu lieu au Studio 14 à Strasbourg, privilégiant une méthode artisanale, loin des grosses machines parisiennes. L’objectif ? Préserver la sincérité de la démarche, tout en bénéficiant d’un accompagnement pointu et personnalisé.
  • Un financement participatif réussi : la production de « Y » a été largement soutenue par les fans. Le budget, estimé à 12 000€ (source : Ulule), a été réuni en quelques semaines, démonstration concrète de la mobilisation autour du projet.
  • Distribution et promotion : 14 Records s’appuie sur le réseau national du distributeur Inouïe Distribution, garantissant à l’album une belle visibilité physique et digitale (points de vente indépendants, plateformes, vinyles en série limitée).

Ce mode de fonctionnement, où le groupe et le label maîtrisent l’ensemble de la chaîne, du studio à la scène, est révélateur d’une philosophie partagée par toute une génération d’artistes du Grand Est : créer local, rayonner plus loin, en toute indépendance. À l’heure où de nombreux projets pâtissent du manque de relais dans l’industrie, ce modèle prouve son efficacité.

Avec 11 titres au compteur, « Y » condense l’énergie scénique de The Yokel et son appétit de nouveautés sonores. On retrouve les influences historiques du groupe (Mumford & Sons, Beirut, Edward Sharpe & The Magnetic Zeros), mais aussi des clins d’œil à la scène indie-folk contemporaine (Milo Greene, The Paper Kites).

  • Richesse instrumentale : cordes (guitare, banjo, mandoline), cuivres et chœurs intergénérationnels se mélangent à une base rythmique plus appuyée, flirtant avec le groove et le rock alternatif.
  • Invités locaux : sur le titre « Black Swans », The Yokel s’offre la collaboration de la chanteuse Camille Brellier (Camicela) et du trompettiste Maxime Weigel, deux figures emblématiques de la scène Grand Est.
  • Production organique : pas d’abus de postproduction, tout a été enregistré dans les conditions « live », pour conserver la spontanéité et le rapport direct avec le public, qui fait la force du groupe sur scène.
  • Ouvertures électroniques discrètes : la nouveauté sur ce disque, ce sont quelques inserts de synthés et de samples atmosphériques, qui enrichissent la palette sans la dénaturer – un équilibre difficile, mais réussi.

L’impact de The Yokel ne se limite pas au simple registre musical. Leur engagement pour l’émergence de la scène Grand Est se répercute sur de nombreux projets : participation à des workshops (Cité de la Musique et de la Danse), organisation de concerts de soutien à Mulhouse et Strasbourg, mentorship auprès de jeunes groupes régionaux.

L’indépendance, c’est aussi assumer la fragilité et la diversité des parcours. The Yokel et 14 Records militent activement pour une meilleure reconnaissance des circuits courts de la culture, tout en encourageant la création de nouveaux réseaux de diffusion (collectifs, projets de coprogrammation avec Le Moloco ou La Laiterie, partenariats médias avec France 3 Grand Est et RBS).

Quelques chiffres-clés

  • 4 000 spectateurs réunis lors de la dernière tournée régionale (source : 14 Records, 2023).
  • Plus de 85 concerts programmés depuis 2017 en France, Allemagne, Belgique et Suisse.
  • Près de 600 vinyles vendus en précommande pour « Y » – une performance notable sur le circuit indé.

L’arrivée de « Y » confirme l’ambition de The Yokel : écrire une musique qui rassemble, fédère et surprend, tout en ouvrant la voie à d’autres collectifs indépendants dans le Grand Est. Derrière la réussite de ce disque, il y a moins un « coup » qu’un travail collectif de fond, preuve que l’alternative s’impose aujourd’hui comme une évidence durable plutôt qu’une posture éphémère.

À suivre : la prochaine tournée du groupe sera l’occasion de mesurer l'impact de « Y » auprès d’un public qui, de plus en plus, cherche ailleurs – loin des modèles formatés, vers l’authenticité. The Yokel, avec 14 Records, participe à écrire une nouvelle page de la création indépendante alsacienne.

Pour explorer l’album, commander le vinyle ou soutenir la scène régionale : www.theyokel.fr – et faire résonner, ensemble, la voix de l’indépendance.